Condamnations pour crimes contre l’humanité : Amnesty international salue un « moment historique »

Réagissant à la condamnation aujourd’hui de huit personnes pour crimes contre l’humanité notamment à la suite du meurtre d’au moins 156 personnes, et des viols et violences sexuelles infligés à au moins 109 filles et femmes le 28 septembre 2009 et les jours suivants à Conakry, Samira Daoud, directrice régionale d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, a déclaré :

« Même si l’organisation n’a pas encore pu faire une lecture approfondie du verdict, nous nous félicitons sur le principe de la condamnation historique de huit accusés, dont l’ancien chef d’État Moussa Dadis Camara, pour crimes contre l’humanité, ce qui rend enfin justice, vérité, et une forme de réparation aux victimes et à leurs familles près de quinze ans après les faits.

« La décision de la Cour de requalifier les faits en crimes contre l’humanité a permis de reconnaître la gravité des crimes, y compris des crimes sexuels. Après un long délai, la Guinée a montré qu’elle avait la capacité et la volonté de poursuivre et de juger les auteurs des crimes commis le 28 septembre 2009 au stade de Conakry. Il s’agit d’un exemple réussi de complémentarité entre la CPI et une juridiction nationale, et c’est la première fois en Afrique qu’un État investigue, poursuit et juge les plus hauts responsables de crimes qui étaient sous l’examen de la CPI.   

« Nous saluons le travail et la détermination des associations de victimes ainsi que des organisations guinéennes et internationales de défense des droits humains, qui ont été déterminants pour permettre l’ouverture de l’enquête, la tenue du procès et le jugement. La mobilisation des autorités guinéennes, le suivi de la CPI et le soutien des pays partenaires ont également démontré que, lorsque la volonté politique des autorités nationales est présente, la justice est possible pour les victimes de meurtres et de violences sexuelles commises par les forces de défense et de sécurité.

« Ce verdict historique pourra servir d’exemple dans le monde entier et en Guinée, où l’utilisation illégale d’armes à feu et l’utilisation excessive de la force lors de manifestations reste monnaie courante, y compris sous le régime actuel, comme l’a dénoncé Amnesty International, et où les crimes sexuels restent largement impunis. »

Contexte

Aujourd’hui, le tribunal criminel de Dixinn a reconnu l’ancien chef d’État Moussa Dadis Camara ainsi que Moussa Tiegboro Camara, Marcel Guilavogui, Blaise Gomou, Paul Mansa Guilavogui, Mamadou Aliou Keita, Claude Pivi et Aboubacar Diakité coupables de crimes contre l’humanité. Claude Pivi, en fuite, a été condamné à la prison à perpétuité. Moussa Dadis Camara a été condamné à 20 ans de prison. Les autres ont été condamnés à des peines de prison allant de 10 à 20 ans. Quatre accusés ont été déclarés non coupables de crimes contre l’humanité. 

Le 28 septembre 2009, au moins 156 personnes ont été tuées par diverses forces armées, et plus de 109 filles et femmes ont été victimes de viols et d’autres violences sexuelles, y compris de mutilations sexuelles et d’esclavage sexuel, selon le rapport de 2009 de la Commission d’enquête internationale.

Les victimes s’étaient rassemblées dans le stade du 28 septembre à Conakry pour protester contre l’intention du chef militaire Moussa Dadis Camara, alors chef du Comité national pour la démocratie et le développement au pouvoir après un coup d’État, de se présenter à l’élection présidentielle.

Amnesty International avait publié un rapport sur ces événements en février 2010.

La Cour pénale internationale (CPI) avait ouvert un examen préliminaire le 14 octobre 2009. Le 29 septembre 2022, le procureur de la CPI a clôturé l’examen préliminaire en reconnaissant la capacité et la volonté de la Guinée de poursuivre et de juger les crimes elle-même.